Dans la maison du bord de l’océan, on entend le ronronnement du lave-vaisselle, et le soleil vient presque jusqu’à mes pieds. Les amies chères écrivent aussi, à côté. Le trajet pour venir jusqu’ici était long comme la fin de l’hiver, bus métro métro métro métro train car douze heures plus tard, c’est que ces retrouvailles se méritent. Très vite, la joie d’être là a effacé la fatigue, on a pédalé sur le chemin de terre jusqu’à l’eau – et ici, les questions se résument à : de quel côté va-t-on la voir, cette eau à reflets ? où s’assoit-on sur la plage, et que va-t-on écrire ? Déjà, je me doute qu’au bout de la semaine, quand il faudra partir, quitter les pins et les dunes, et les discussions et les lectures, ça laissera un petit goût amer, déjà, j’imagine que je garderai les crépitements du feu dans la cheminée, l’onctuosité de la soupe et des mots. Mais en attendant, comme ce qui compte évidemment, c’est quand même le présent, je savoure un moment après l’autre, et mes 47 bonnes étoiles.
“que la route soit longue, ça ne fait rien, pourvu qu’elle soit belle”
Je rentre de l’été et je n’écris pas tout de suite, pas encore. Je me remets au travail, d’abord. Une rentrée d’août comme tous les ans, ce même emploi du temps à chaque fois, toute l’énergie là dedans, un groupe de débutant.e.s avec qui on rit aux éclats les matins ; des enfants dans les parcs bouche bée devant les albums qu’on choisit les après-midis, et ce rythme dense. Petit à petit, les marques de la vadrouille disparaissent, on met des vêtements différents que les trois robes emmenées pour six semaines, le duvet est lavé, il y a à nouveau mille choix pour le thé.
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la friche
Je cherche des images pour dire à quoi ça ressemble, ces semaines, et je ne sais pas trop. Un jour au téléphone, Lotte me parle d’une pièce en chantier : on a fait des trous et il y a de la poussière partout ; on attend qu’elle retombe pour voir ce que ça donne. Ce sera sans doute mieux, après. Ah oui, alors c’est ça, exactement. De la poussière plein les cheveux et l’odeur du plâtre qui plane, et cet engouement au moment où on a la perceuse entre les mains : on pourrait toucher à ce mur-là mais pourquoi pas aussi à celui-ci ou à cet autre encore, ce n’était pas prévu mais tant qu’on y est, et je ne sais plus très bien comment m’arrêter. J’attends que ça s’apaise, et je sens que ça vient, de temps en temps. L’autre jour je disais, je me sens légère, ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé. On parle de carcan et même si ça me paraît très fort, comme mot, je crois que je le comprends comme il faut. En chantier, donc, ou en friche, peut-être.
Je rêve de champs de coquelicots.