miettes d’OuLiPo : “La n-ine, qui généralise la sextine, est un poème de n strophes (n étant un nombre entier), chacune de n vers, chaque vers de chaque strophe terminé par un mot-clef différent. On se donne n mots-clefs qui terminent les n vers de la première strophe. Dans la seconde strophe le premier mot-clef vient à la place 2, le deuxième à la place 4, et ainsi de suite (tant que possible). Les places manquantes sont alors remplies par les autres mots (écrits dans l’ordre inverse).”
quinine du blues
(blues, agrumes, domino(s), vitre(s), violon(s))
un soir un peu en blues
la vie comme une histoire d’agrumes
ses angoisses en dominos
le chat regarde par la vitre
est-ce qu’il sort dans sa tête les violons ?
une nuit à écouter son violon
à hésiter entre gospel et blues
à guetter nos pluies contre la vitre
à presser un corps et des agrumes
à aligner minutieusement les dominos
parfois je me sens comme un vieux sans ses dominos
comme un chef d’orchestre sans ses violons
comme un thé du matin sans agrumes
comme une après-midi d’hiver sans blues
comme une maison sans fenêtres ni vitres
ouverte aux quatre vents sans fenêtres ni vitres
lasse et désœuvrée sans tous mes dominos
froide et démesurée sans un morceau de blues
immobile, impatiente sans partition-violon
amère sans raison d’être ni agrumes
j’ai dans le ventre une peau d’agrumes
dans la bouche la buée de la vitre
j’ai dans le corps les cordes du violon
lentement s’imbriquer en dominos
pour mille coups de cœur, j’accepte un coup de blues